Les origines fascinantes du kéfir de lait

Mais quelles sont les origines du kéfir de lait? Pour parvenir jusqu’à nous, ce fameux lait fermenté a traversé les époques et bien des péripéties.

Nous avons fait un peu de recherches pour vous rapporter les origines fascinantes du kéfir de lait!

Au menu: un cadeau divin, une espionne séductrice, un kidnapping et un prince rejeté. Rien de moins!

Les premières traces du kéfir

Le kéfir de lait existe depuis plusieurs milliers d’années. Ses traces les plus anciennes ont été trouvées dans une tombe vieille de 4000 ans, située dans la région de Xiohe en Chine.

Le kéfir était donc consommé dans le monde antique! À travers les époques, le kéfir aurait été prisé et consommé par de nombreux peuples autour du globe.

Toutefois, selon plusieurs historiens, si le kéfir de lait s’est rendu jusqu’à nous, c’est grâce à son importance capitale pour les peuples du nord du Caucase.

Il y a plus de 2000 ans, cette région entre la Russie et la Géorgie était peuplée de montagnards nomades, qui élevaient des troupeaux de chèvres et de bovins pour leur lait.

On a tendance à l’oublier, mais le lait frais a une durée de conservation très courte. Sans réfrigérateur, la meilleure façon pour le conserver est de le fermenter.

Les nomades du Caucase fermentaient leur lait dans des outres en cuir grâce à des grains de kéfir.

Le kéfir faisait partie de leur quotidien: quand les bergers prélevaient le kéfir dans les outres, ils y ajoutaient du nouveau lait frais, pour faire du kéfir en continu. Cette technique était transmise de génération en génération.

À l’époque, les grains de kéfir avaient une grande valeur et faisaient partie des héritages familiaux.

Femme nomade en train de verser du lait dans une outre en peau de chèvre
Femme nomade en train de verser du lait dans une outre en peau de chèvre

Les grains de kéfir: un cadeau divin?

Selon les légendes, les grains de kéfir ont été donnés en cadeau au peuple Karatchaï par le prophète Mahomet lui-même.

Ce n’est pas étonnant qu’on leur attribue une origine divine.

Les grains de kéfir, aussi appelés «grains du prophète», possèdent des pouvoirs quasi magiques: ils transforment le lait en produit sain, sans danger, fortifiant et qui se conserve plus longtemps. De vrais magiciens!

D’un point de vue scientifique, les grains de kéfir se seraient formés à force d’ajouter et d’enlever du lait dans des outres de peaux animales.

Les microorganismes du lait cru et ceux des outres auraient, à la longue, formé une colonie symbiotique de levures et de bactéries sous forme de petits grains gélatineux.

Là est la magie des grains de kéfir: personne, à travers les époques, n’a réussi à recréer des grains de kéfir artificiellement.

Pour créer des grains de kéfir, il faut absolument… des grains de kéfir! Les grains sont nés du hasard, et ensuite perpétués à travers le temps.

Les grains de kéfir furent longtemps tenus secrets par les peuples du Caucase. Selon leurs croyances, les grains auraient perdu leurs pouvoirs «magiques» si leur existence avait été révélée à des étrangers.

En parler, ou pire, en donner, c’était commettre un crime religieux et risquer de détruire une tradition millénaire.

La Russie veut percer le secret du kéfir: espionnage et séduction

Au cours du XIVᵉ siècle, des chercheurs russes ont commencé à s’intéresser à la remarquable longévité des montagnards du Caucase.

Certains médecins attribuèrent cette vitalité au kéfir, et ils s’en procurèrent pour le tester sur des malades.

Les premières études scientifiques de l’époque déclarèrent que le kéfir aidait à traiter de nombreuses maladies comme les troubles de digestion et la tuberculose.

Toutefois, il était très difficile de se procurer du kéfir, et les scientifiques russes n’arrivaient pas à le reproduire.

Il leur manquait l’ingrédient «magique» : les grains de kéfir. Impossible de mettre la main dessus!

Le cortège de médecins confia la mission d’obtenir des grains de kéfir à une certaine Irina Sakharova.

Cette jeune femme d’à peine 20 ans était diplômée avec tous les honneurs d’une école de fromagerie renommée et avait gagné des prix pour avoir développé une méthode unique de fabrication de beurre.

En bonus: elle était d’une grande beauté.

On envoya la jeune femme en espionnage à la cour du prince Karatchaï, Bek-Mirza Barchorov. Sa mission?

Charmer le prince pour qu’il lui offre des grains de kéfir et le secret de sa fabrication. Simple, non?

Sakharova et Barchorov
Sakharova et Barchorov, 5 mai 1908

Séduit, le prince fût. Durant son séjour, Sakharova reçut des fleurs et des cadeaux de toutes sortes, et le prince ne la quittait pas des yeux durant les célébrations.

La jeune femme profita de cette attention et insista pour qu’il lui offre de précieux grains de kéfir.

Néanmoins, vu l’interdiction religieuse de partager les grains de kéfir avec les étrangers, Barchorov refusa de révéler son secret.

Sakharova s’en retourna chez elle, les mains vides.

Toutefois, sur le chemin du retour, elle fut capturée (!) par les hommes du prince et ramenée à sa cour.

Le prince souhaitait l’épouser.

Sakharova refusa évidemment le mariage. Elle contacta ceux qui l’avaient envoyée en espionnage pour qu’ils tentent de la sortir de ce mauvais pas.

L’affaire se répercuta jusqu’à la cour du tsar Nicolas II. Le prince rejeté fut forcé d’offrir compensation pour ses actes, au risque de troubler les relations entre les deux peuples.

Il proposa des bijoux, de l’or et des richesses, mais Sakharova refusa. Elle était venue pour remplir sa mission, et ne comptait pas échouer.

Sous l’ordre du tsar, et sous les demandes soutenues de Sakharova, le prince dû lui céder les grains de kéfir.

En 1908, Irina Sakharova rapporta en Russie les premiers grains de kéfir de lait.

Après la Russie, le monde!

Le kéfir s’est rapidement répandu en Russie. Au début, on l’utilisait dans les sanatoriums pour soigner les malades.

Vers les années 1930, il fut commercialisé à grande échelle et devint rapidement un aliment de tous les jours, aussi commun que les œufs ou le pain.

Désormais, on produit du kéfir de lait partout dans le monde. On le retrouve sous de nombreux noms: champignon tibétain, grains du Prophète, lotus des neiges, kewra, talai, galodium, tara, etc.

De nombreuses cultures ont adopté le kéfir et l’ont intégré à leur alimentation.

Depuis quelques années, le kéfir se retrouve de plus en plus dans les rayons des supermarchés, à côté des yaourts et autres produits laitiers.

Certains producteurs artisanaux utilisent encore les grains pour fermenter leur kéfir.

Toutefois, la majorité des producteurs commerciaux le produisent à partir de cultures en poudre sélectionnées.

En parallèle, les grains de kéfir ont continué à se transmettre, de famille en famille et d’ami en ami.

La culture du partage s’est préservée: en partageant ses grains, on partage aussi les connaissances pour les perpétuer.

Une tradition vivante

Les grains de kéfir de lait que nous avons aujourd’hui sont des descendants directs de ceux qui sont nés il y a des milliers d’années dans le monde antique.

Si on y a accès de nos jours, c’est en partie grâce à Sakharova, mais aussi grâce aux générations de femmes et d’hommes qui ont contribué à propager les grains à travers les époques.

Souhaitez-vous faire partie de cette belle tradition? Vous pouvez vous aussi adopter des grains de kéfir de lait!

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